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Terra Lib’Tour : Jardin’en Vie

L’urgence des semences paysannes

Manger biologique et local, en direct du producteur, cultiver en permaculture et construire son autonomie alimentaire … Voilà de belles idées ! Ces préoccupations sont présentes à l’esprit de bon nombre de gens que nous avons déjà croisé sur le chemin du Terra Lib’ Tour.

Mais si l’on prenait un peu le temps de questionner la graine ? Comment est-elle sélectionnée ? Qui la cultive ?
Que l’on achète des graines ou des plants pour notre potager, ou que l’on achète nos légumes dans notre Amap, au marché ou au magasin biologique, d’où vient cette graine qui est à la base de tout ?

Nous sommes nombreux à connaître Kokopelli, renommée pour son travail de conservation des variétés anciennes depuis longtemps. Au début de notre périple nous avons pu croiser, mais juste le temps d‘une balade nocturne, mon copain Mika, qui a créé la ferme urbaine Perma’g Rennes et cultive lui aussi les semences paysannes. Alors aujourd’hui, nous voici rendu près de Valence et nous avons pris le temps de rencontrer Jardin’en Vie.

Mais l’équipe court de partout en cet après-midi du vendredi : tri des tomates pour expédier à une épicerie parisienne, chargement d’un camion pour une foire bio… nous trouverons tout de même quelques minutes pour échanger avec Eric Marchand, créateur et gérant de la SCOP.

Avec Eric, nous nous connaissons peu, mais avons déjà partagé plusieurs rencontres au sein de notre organisation Minga, rassemblant des « producteurs d’intérêt général » de tous métiers.
On entend beaucoup parler des variétés anciennes de légumes, et des semences paysannes. Je lui ai donc demandé quels en étaient les enjeux.

Pour Eric, le constat est alarmant. La semence reste le sujet oublié de l’alimentation alors qu’elle en est le fondement !! Manger biologique et local est une très belle avancée, mais cela n’a aucun sens si nos légumes sont issus de graines hybrides F1. Surprise ! et oui, même en bio, l’essentiel de légumes proviennent de ces variétés brevetées et commercialisées par les grands groupes de la semence.

Pourtant, au-delà de la nécessité évidente de casser les monopoles, et de s’affranchir de ces grands semenciers qui privatisent le vivant, les variétés paysannes ne manquent pas d’arguments : adaptées à la polyculture, produites dans le champ du paysan elles favorisent son autonomie ; avec une grande variété génétique, elles offrent une liberté de choix au consommateur, et aussi bien sûr une grande qualité nutritive et gustative.

Mais pour Eric, c’est pour tenter d’enrayer le changement climatique que nous devons très vite remettre en culture et largement les semences paysannes. Elles seules ont cette capacité à créer des plants en symbiose avec leur sol, un système racinaire très dense en harmonie avec les micro-organisme ; et recréer de l’humus !! cet humus qui manque terriblement à la surface de notre planète aujourd’hui alors qu’il est notre meilleure ressource pour stocker du carbone.

Mais les maraîchers tardent à s’y mettre, par peur du changement, de mauvais rendements, ou méconnaissance ?

Pourtant, à Jardin’en Vie, ce n’est pas le manque de débouchés qui freine. Et devant l’urgence et la nécessiter d’agir, ils cherchent à changer d’échelle. La Scop vient d’acquérir de nouvelles terres pour passer de 4 à 20ha, et ils visent à étoffer l’équipe pour passer de 6 à 20 personnes d’ici à 2020. Il ne manque plus que les fonds, car il va falloir encore investir. Pour assainir les terres par exemple, 4 ans sont nécessaires ; quand on pense que les agriculteurs conventionnels ont reçu des subventions pour détruire des haies et balancer des pesticides alors que les politiques agricoles n’accordent rien à celles et ceux qui régénèrent les sols !!

Avec la création de l’OPASE (organisation professionnelle des artisans semenciers), ils cherchent maintenant à faire reconnaitre le métier d’Artisan Semencier afin de valoriser ce savoir-faire, former des jeunes et bénéficier de travaux de recherche. Car c’est un travail au combien ardu. Cultiver des végétaux pour leurs graines et assurer leur conservation, c’est devoir faire face à des risques de pollinisation et d’hybridation naturelle : il faut alors compter sur une barrière de culture.

S’il est autorisé de vendre des graines aux particuliers, il reste interdit de le faire auprès de professionnels, ou de vendre des plants. Mais devant ces enjeux, devons-nous attendre sagement que l’état s’affranchisse des lobbys des grands semenciers ? Jardin’en Vie et les autres membres des croqueurs de carotte ont pris leurs responsabilités. C’est à nous, jardiniers amateurs, maraîchers, distributeurs, magasins biologiques et primeurs d’en faire autant.

Ressemons ensemble des graines vivantes, libres et nutritives… !

Minga, l’Alliance Slow Food des cuisiniers, le Groupement des agriculteurs bio du Finistère et le Syndicat des Artisans Semenciers lanceront prochainement

la campagne « Graines d’une Bretagne d’Avenir »

soutenue par certaines Biocoop de la région. Ils ont décidé d’unir leurs efforts pour promouvoir l’usage de semences variétés-populations,auprès des agriculteurs et des jardiniers, professionnels et amateurs, du territoire. Des kit de campagne avec livrets et graines seront bientôt disponibles pour vos semis de printemps !

Thomas, en Terra Lib’ Tour

Jardin’en Vie
Minga – graines d’une Bretagne d’Avenir

27Fév2019

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